samedi 15 juin 2013

L'ingénieux hidalgo Don Quichotte de la Manche

L'INGENIEUX HIDALGO DON QUICHOTTE DE LA MANCHE (1 et 2)
J'ai pris le parti de ne pas m'affoler sur le challenge ABC de cette année. C'est mon premier, et je m'y suis surtout inscrite pour me contraindre (ce n'est pas le mot exact étant donné que j'y prend plaisir, mais enfin) à lire des gros classiques qui me faisaient peur, ou que je n'ai pas eu le temps de lire pendant mes années prépas.
Donc, Don Quichotte, monument de la littérature, inspiration de nombreuses peintures et mythe, faisait partie de ma liste. Je voulais le lire depuis bien longtemps, parce que, comme beaucoup de gens, l'image d'un homme assez perdu dans son imaginaire pour attaquer des moulins en hurlant que ce sont des géants me séduisait beaucoup.
Est-ce que j'ai vraiment besoin de présenter l'oeuvre de Cervantes? Don Quichotte est l'habitant aisé d'une petite ville d'Espagne qui lit trop de romans de chevalerie. Il est dans la quarante/cinquantaine, n'est pas marié, et décide un jour de s'établir chevalier errant et de partir sur les routes à la recherche d'aventures avec un paysan de son village, Sancho Panza. Sancho est d'abord présenté comme un idiot gros plein de soupe et grossier, Don Quichotte comme un illuminé fini, un pauvre type qui n'a pas vécu grand chose et du coup délire en prenant ses rêves pour réalité. Les aventures qu'ils vivent sont fausses et grotesque, le ton est tout à fait à la farce.
Et c'est principalement pour ça, en fait, que j'ai eu beaucoup de mal à aller jusqu'au bout du tome 1. Parce que je m'attendais à quelque chose de poétique, une fresque pathétique mais sublime d'un fou rêveur qui parcoure l'Espagne et s'invente mille vie. Je vous spoile la chose tout de suite: l'épisode des moulins fait à peu près cinq lignes sur un tome de 577 pages. J'ai été déçue pendant un bon moment, et je me suis un peu forcée à continuer d'une part parce que je n'aime pas abandonner les livres en cours de route, d'autre part parce qu'il me fallait trouver une raison à tous les mythes et toutes les fascinations que ce roman a pu déclencher. J'ai donc avancé, et je suis arrivée vers le milieu/fin du tome 1, où commencent à se raconter de longues histoires dans la bouche d'autres personnages que l'on rencontre, qui déversent leurs malheurs puis que l'on quitte. Et c'est un peu devenu comme les Mille et une nuits, associé au sous texte qui naît peu à peu du profond pathétique de Don Quichotte qui finalement amène l'attendrissement aussi bien que le rire (parce que oui: on rit). J'ai continué donc, plus pour continuer à lire les différentes histoires des différents figurants que pour suivre le périple de Don Quichotte et de son fidèle écuyer. Et c'est comme ça que j'en suis arrivée à finir, après de biens longs jours, le tome 1.
Le tome 2, je trouve, devient plus subtil (ou alors c'est moi qui suit devenue plus subtile à force de fréquenter les personnages et la plume, je ne sais pas). Est donnée aux personnages une profondeur supplémentaire. Don Quichotte qui n'était qu'un pauvre illuminé grotesque et pathétique se voit renforcer son caractère extrêmement sensé. Oui, il croit qu'il est renommé par ses exploits fantastiques et qu'il a vu mille merveilles au fond d'une caverne, mais il tient aussi des discours presque philosophiques, emplis de sagesse - et le pathétique et l'attendrissement qu'il provoque ne fait que s'accentuer vers la fin. Don Quichotte n'est qu'un avide lecteur qui cherche de plus en plus d'histoire à vivre, et qui à force, en crée par lui même. Sancho, lui, enfile les proverbes dans ses phrases jusqu'à ce qu'ils n'aient plus l'air d'avoir aucun sens, mais gouverne ce qu'il croit être un archipel avec mesure, ne s'avachit pas dans l'excès, n'abandonne pas son maître malgré les aventures malheureuses d'où il sort souvent abîmé où il le traîne, se révèle ne pas être si glouton que ça - suit son maître dans sa folie, montre toujours des signes de bêtises, mais reste loyal et parfait dans l'archétype du valet (bien qu'il ne soit pas que ça). Bien sûr la sottise et la farce est toujours présente, mais elle prend un tour encore plus ambigu. Maintenant, j'aimerais bien lire des essais sur Don Quichotte. Je crois qu'il s'agit d'un tel monument de la littérature qu'il est difficile de ne pas le lire s'en s'intéresser à tout ce qui s'est développé autour. Ca donnera à la chose une dimension bien plus profonde (puisqu'après tout, ma critique de gamine de vingt et un an n'est là que pour me rappeler ce que j'en pensais dans vingt ans, et aussi pour éventuellement aiguiller certains d'entre vous, si possible, mais sans autre prétention aucune).

Je vais donc enchaîner mon challenge ABC 2013 sur L'inattendu, de Charles Juliet. Bonnes lectures à tous!

CITATIONS (il n'y en a qu'une seule d'abord parce que je n'en ai pas beaucoup - j'ai eu un certain mal avec la plume de Cervantes - et parce que les autres spoilent un peu trop à mon goût):

"Le jour se leva, plus tôt qu'on ne l'attendait, comme si le soleil n'avait pas voulu manquer le spectacle de ce sacrifice."

BILAN:

1. 13/20 - 2. 14/20
Il est dit de Cervantes qu'il a écrit Don Quichotte suite aux échecs répétés de ses précédents manuscrits, frustré de voir que les romans de chevalerie se publiaient comme des petits pains à son époque. Il a d'une certaine manière détourné la tendance. Il est également dit qu'il détestait Don Quichotte. Pour ma part, j'ai lu le deuxième tome de Don Quichotte de la même manière que j'ai pu lire les Trois Mousquetaires quand j'étais plus jeune: d'une traite, sans chercher l'implicite plus avant. Je me suis attachée aux personnages peu à peu (assez lentement étant donné le mal que j'ai eu à lire le tome 1) et j'ai refermé le livre avec une grande tristesse de m'en séparer, surtout sur cette note là que je ne vous dévoilerai pas.
Si vous avez, donc, le courage de vous lancer dans ces deux tomes-géants de la littérature, je vous y encourage. Ayez cependant conscience, en ouvrant le premier tome, que vous serez peut être décontenancés par un style d'écriture très particulier et très farcesque beaucoup plus que poétique, qu'on sent venu d'une époque lointaine et qui pourtant est terriblement moderne.

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2ème lecture pour le challenge



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